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Mathieu Petresco

Contrebande et contrefaçon de cigarettes

Dernière mise à jour : 9 mai 2023



La contrebande de marchandises, en particulier de cigarettes, touche de nombreux pays à travers le monde. Cette activité illégale, sanctionnée par le droit pénal, consiste à faire passer clandestinement des produits d'un pays à un autre, sans payer les droits et taxes applicables.


La contrebande se double parfois de contrefaçon, les États réprimant également ce délit compte tenu de la dimension de santé publique afférente à la consommation de tabac. En effet, si les risques sanitaires sont déjà élevés en matière de tabac légal, ils le sont tout autant voire davantage lorsqu’il s’agit de tabac illicite, étant donnée l’absence totale de contrôle de la production, du stockage et de la « qualité ».


Ces infractions entraînent des pertes économiques considérables pour les États, raison pour laquelle la contrebande et la contrefaçon de tabac sont sévèrement sanctionnées par des dispositions pénales et douanières.



1. La contrebande de cigarettes : Une infraction sévèrement sanctionnée par le droit pénal et douanier


En droit français, la contrebande de tabac est sévèrement réprimée par le Code des douanes qui prévoit des sanctions pénales et douanières pour les contrevenants.


L’article 414 du Code des douanes (modifié par la loi n°2016-1918 du 29 décembre 2016) réprime :


« d'un emprisonnement de trois ans, de la confiscation de l'objet de fraude, de la confiscation des moyens de transport, de la confiscation des objets servant à masquer la fraude, de la confiscation des biens et avoirs qui sont le produit direct ou indirect de l'infraction et d'une amende comprise entre une et deux fois la valeur de l'objet de fraude, tout fait de contrebande ainsi que tout fait d'importation ou d'exportation sans déclaration lorsque ces infractions se rapportent à des marchandises de la catégorie de celles qui sont prohibées au sens du présent code ou aux produits du tabac manufacturé.

La peine d'emprisonnement est portée à une durée maximale de cinq ans et l'amende peut aller jusqu'à trois fois la valeur de l'objet de fraude lorsque les faits de contrebande, d'importation ou d'exportation portent sur des biens à double usage, civil et militaire, dont la circulation est soumise à restriction par la réglementation européenne.

La peine d'emprisonnement est portée à une durée de dix ans et l'amende peut aller jusqu'à dix fois la valeur de l'objet de la fraude soit lorsque les faits de contrebande, d'importation ou d'exportation portent sur des marchandises dangereuses pour la santé, la moralité ou la sécurité publiques, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé des douanes, soit lorsqu'ils sont commis en bande organisée ».


Les peines délictuelles peuvent donc être portées à 10 ans d'emprisonnement et les amendes peuvent atteindre plusieurs millions d'euros pour les contrebandiers, les produits de contrebande peuvent être saisies et détruits. Les personnes qui achètent des cartouches de contrebande peuvent également être poursuivies pour complicité de contrebande.


Le procureur de la République, représentant les intérêts de la société et appliquant la politique pénale, n'hésite pas à requérir des peines sévères en répression de ce délit à l'encontre des personnes poursuivies.


Ainsi, lors d'un procès devant le Tribunal judiciaire de Pontoise, « le ravitailleur et le « chef d’équipe des vendeurs », tous deux âgés de 32 ans, ont écoupé d’une peine de 18 mois de prison avec mandat de dépôt, le logisticien et l’une des nourrices d’un an avec maintien en détention. L’importateur, 34 ans, a été condamné à un an de prison avec sursis probatoire et une amende de 5.000 euros. Enfin, la deuxième nourrice, un homme âgé de 50 ans, a écopé de 8 mois d’emprisonnement avec sursis et 5.000 euros d’amende ». Le Tribunal judiciaire a également ordonné la destruction de 6.750 cartouches contrefaites (https://www.20minutes.fr/justice/3351451-20220922-un-reseaux-de-trafic-de-cigarettes-demantele-six-personnes-condamnees-dans-le-val-d-oise).


De même, dans une autre affaire, le Tribunal judiciaire de Béthune a condamné un homme à la peine de 15 mois de sursis probatoire pendant deux ans et, une femme à la peine de 6 mois de sursis probatoire pendant deux ans ainsi qu’à des amendes douanières respectives de 344.305€ et 50.000€ (https://www.lavoixdunord.fr/1274760/article/2023-01-05/bethune-344-000eu-d-amende-douaniere-et-du-sursis-pour-un-trafic-de-cigarettes).


Enfin, le 7 mars 2023, le Tribunal judiciaire de Paris, quatre personnes ont été condamnées à des peines comprises entre 6 et 8 mois d’emprisonnement outre une amende douanière de 80.000 euros et la destruction de 1.835 cartouches.



2. La contrefaçon de cigarettes : La Chine, principal producteur mondial


Les cigarettes de contrefaçon désignent des produits vendus comme des originaux alors qu’ils ne sont que des copies. Elles constituent une part croissante des saisies douanières au sein de l’Union européenne et des délits sanctionnés, en particulier en France.


La grande majorité des cigarettes contrefaites est d’origine chinoise. Elles sont acheminées dans des containers par voie maritime via les grands ports du nord de l’Europe.


Le degré de contrefaçon est variable, certaines sont grossièrement copiées (on parle de produits contrefaisants) alors que d’autres sont particulièrement trompeuses, requérant l’œil d’un expert pour distinguer la copie de l’originale.


Légalement, seuls les propriétaires des marques peuvent déterminer la nature contrefaisante ou non des cigarettes saisies. La coopération des fabricants avec les autorités publiques est indispensable dans la détection des produits contrefaits.


La Chine serait le principal lieu de production. Néanmoins, toute estimation serait hasardeuse en raison de l’opacité des productions et des frontières entre contrefaçon et exportation parallèle. Si les autorités chinoises déclarent démanteler environ 2.000 usines illégales par an, l’incidence demeure relativement limitée sur le volume de cigarettes contrefaites produites en Chine.


La fabrication illégale de cigarettes est lucrative et les risques pénaux bien en deçà de ceux encourus pour la production de stupéfiants. L’investissement initial nécessaire au lancement d’une usine de fabrication de cigarettes est estimé entre 600.000 et 700.000 euros, une somme qui peut être amortie avec une seule cargaison.


Enfin, les cheap whites ou illicit whites représentent un phénomène relativement nouveau désignant des cigarettes produites en toute légalité dans des pays où la législation le permet puis introduites en contrebande sur les marchés français ou européens, sans aucune autorisation.


Les principales marques de cheap whites ou illicit whites sont « Jin Ling », « Compliment » ou « Rothmans », produites notamment à Kaliningrad (Russie), en Ukraine et en Moldavie.



3. Le renforcement de la lutte contre la contrebande et la contrefaçon de cigarettes


La lutte contre la contrebande et la contrefaçon de tabac a conduit de nombreux pays à mettre en place des politiques et des dispositifs de coopération internationale pour renforcer leur action.


En France, ces infractions sont un domaine où les réseaux de grande criminalité croisent des réseaux régionaux. Distincte du commerce des stupéfiants (repartit sur des territoires déterminés, système pyramidal avec des rôles bien établis), la vente à la sauvette fonctionne en paliers, sans tête de réseau et avec une étanchéité entre revendeurs (le plus souvent de jeunes hommes).


Les douanes judiciaires adoptent des stratégies d’enquête selon les circonstances :

  • Le traitement en enquête de flagrance puis en comparutions immédiates devant le Tribunal judiciaire suite à des constatations douanières afin d’obtenir une réponse pénale rapide ;

  • Le recours à des stratégies d’enquête plus longues (recours aux moyens cachés, méthodes identiques à celles du trafic de stupéfiants, hiérarchisation des rôles) permettant à la police ou la gendarmerie d’avoir recours aux moyens d’investigation spécifiques à la criminalité organisée.


Pour accroître encore l’efficacité de son action face à ce marché parallèle, les douanes ont renforcé leur action en matière de renseignement et de contrôles par :

  • De nouvelles techniques de ciblage pour un démantèlement plus efficace des filières d’approvisionnement du marché illégal ;

  • L’obligation pour les fournisseurs d’accès à Internet et les hébergeurs d’informer le public de l’illégalité et des risques encourus pour l’achat de tabac sur Internet, sous peine de sanctions pénales ;

  • Des actions de contrôle renforcées et ciblées par la police, la gendarmerie ou les douanes, notamment dans les régions frontalières et les grands centres urbains où la vente de cigarettes est importante ;

  • Des enquêtes menées par la Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (DNRED) ;

  • Des opérations ponctuelles, ciblées sur différentes routes, ports et aéroports, trains, fret et fret postal.


Depuis le 1er janvier 2015, la vente et l’achat des produits du tabac à distance sont interdits quel que soit le pays d’origine.


Les fournisseurs d’accès à Internet et les hébergeurs ont l’obligation d’informer le public de l’illégalité et des risques encourus pour l’achat de tabac sur Internet, sous peine de sanctions pénales. L’administration des douanes est dotée d’une cellule spécialisée dans la lutte contre la délinquance douanière sur Internet que ce soit sur le web référencé ou sur le Darkweb.

Enfin, l’article 154 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, loi de finances pour 2020 prévoit, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, la collecte et l'exploitation des contenus librement accessibles sur les sites internet des opérateurs de plateforme tel WeChat ou Huarenjie (technique du webscrapping).


Si vous vous retrouvez dans une des situations décrites ci-dessus en lien avec la vente, le transport ou la possession de cigarettes de contrebande ou contrefaites, Mathieu Petresco, Avocat en droit pénal, peut vous conseiller, vous assister et défendre vos droits devant le Tribunal judiciaire afin de limiter les conséquences pénales et financières de ces infractions.



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